Prouvais en 1919

 

Pendant les quatre années de guerre la ligne de front n'a pas beaucoup changé dans la région comprise entre Craonne et Reims. Prouvais, qui s'en trouvait à 7 kilomètres, fut occupé par les troupes allemandes alimentant les tranchées. S'il eut à souffrir de cette occupation, du moins le gros des constructions resta intact jusqu'au commencement de 1917. A ce moment, les Français préparaient, en grand secret, cette fameuse offensive que les Allemands connaissaient deux mois à l'avance, dont les premiers buts à atteindre étaient précisément la prise des buttes de Brimont et de Prouvais. La population fut alors évacuée en Belgique et ensuite rapatriée dans les Pyrénées.

Les Allemands, ne se sentant plus en sûreté dans le village, s'installèrent complètement dans les bois. Pour construire leurs abris et logements ils ne trouvèrent rien de mieux que de démolir méthodiquement les maisons et l'église er d'en utiliser les matériaux : briques, tuiles, portes, persiennes, etc. Les pierres dures servirent au blocage des chemins, les bois de construction non utilisés furent brûlés. La dévastation fut si complète, qu'à l'armistice, on ne trouvait ni un bout de solive, ni une poutre dans le village. Une seule maison conserva son toit, en piteux état il est vrai. Les murs qui restèrent debout furent ceux construits en matériaux inutilisables : briques de terre calcaire ou « carreaux » et en craie. Comme ces murs étaient hourdés avec un mortier de sable argileux, les intempéries eurent beau jeu pour achever leur destruction avant qu'on ait pu en protéger les restes, ce qui obligea à raser complètement le village.

Malgré que les Français, au moment de l'offensive de 1917, arrivèrent au village pendant deux heures, on ne voyait presque pas d'entonnoirs d'obus ou de murs éclaboussés par la mitraille.

Quand les premiers habitants revinrent, sans ressources, trouvant leurs maisons anéanties, ils ne purent qu'utiliser des abris dans les bois que l'ennemi n'avait pas brûlés en se retirant. Ces abris, groupés en quatre endroits différents, furent en partie épargnés sur la pente nord de la colline, près de la fontaine, ce qui facilita l'approvisionnement indispensable en eau : on ne pouvait guère se servir des puits du village qui étaient éloignés, n'avaient plus leur treuil, étaient comblés en partie et contenaient des obus non éclatés : Dans l'un on trouva lors du déblaiement le cadavre d'un soldat allemand.

L'installation des logements allemands dans les bois avait pris, à cause de la durée de la guerre, la proportion de construction de villages : ainsi « au Colombier », où se trouvait caché dans un petit vallon entre deux bois le ballon d'observation sur la vallée de l'Aisne et les collines de Reims à Craonne, les occupants avaient creusé un puits à ouverture carrée d'environ 1 m. 50 à 2 m. de côté, descendant à une profondeur de 40 mètres, consolidé comme un puits de mine. Un moteur électrique actionnait une pompe qui élevait l'eau dans un réservoir de sucrerie. Une canalisation la conduisait ensuite aux cagnas des soldats et aux villas des officiers, car on peut donner ce nom à des constructions en briques, avec enduits, peinture à l'huile, décoration au pochoir; certaines avaient des vérandas où on arrivait par des escaliers en ciment. Situées au milieu de la verdure épargnée, elles devaient offrir un séjour agréable : la vue y était bornée, mais à une cinquantaine de mètres, sur la lisière du bois, on se dédommageait par un panorama étendu qui conduisait le regard jusqu'aux limites de la vision vers l'Est, vers Brimont, vers Moronvillers, vers l'Argonne.

Les quelques vues de « Prouvais en 1919 » sont destinées à montrer le caractère particulier du village l'année de la réoccupation.

 

 

 

Alexandre MENU.

 


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